Le lierre grimpant est une plante très répandue qui a souvent mauvaise réputation, à tort. Découvrez ses caractéristiques et ses vertus médicinales.
Un peu de botanique !
Le nom de genre , Hedera, est une corruption du mot latin Hedea qui signifie : la corde, l’attache. Le nom d’espèce Helix dérive du latin et signifie enlacer à la façon d’une spirale.
Il appartient à la famille des Araliaceés dont il est la seule espèce sauvage en Europe occidentale. Ailleurs dans le monde il y a plus de 50 genres et la majorité de ces plantes sont tropicales. Le ginseng par exemple en fait partie (Panax quinquefolium).
Le comportement du lierre est le résultat d’une longue adaptation. Il est apparu sur terre à la fin de l’ère secondaire au Crétacé qui suit le jurassique, se termine par l’extinction des dinosaures, et précède le paléogène. Le climat était alors tropical! Le groupe des angiospermes, les plantes à fleurs, s’étend alors grâce à une co-évolution avec les pollinisateurs comme les abeilles. Le lierre fut une des seules avec le houx, l’hellébore et le laurier des bois (Daphne laureola) à résister aux grands changements climatiques qui suivirent…
Ces espèces ont en commun d’avoir une floraison automnale ou hivernale. Le lierre a une remarquable aptitude à résister à la chaleur et la sécheresse et se plaît dans le paysage méditerranéen. C’est dans ces régions qu’on trouvera des spécimens qui peuvent atteindre les 4000 ans.
Il fait des jeunes pousses deux fois par an: au printemps et à la fin de l’été, et c’est lors de la seconde pousse que se formeront les tiges florifères. Les feuilles vivent 3 ans et doivent leur brillance à la couche de cutine, une sorte de cire imperméable. Pour fleurir le lierre a besoin de suffisamment de photons d’où sa quête de lumière. Sur un pied issus de semis, la floraison intervient 8 à 10 ans après la naissance de la plantule.
Le lierre fleurit fin août en Méditerranée et jusqu’en novembre plus au nord. Sa fleur est de couleur vert jaunâtre avec 5 étamines et 1 style simple. L’ovaire à 5 loges est une drupe à maturité en hiver et persiste souvent jusqu’au printemps.
Le lierre, un parasite ?
Contrairement à l’image que l’on s’en fait, il y a une synergie entre le lierre et son arbre support. Le lierre apporte la fraîcheur et un compost remarquable à l’arbre qui le porte vers les cieux. Il abrite une faune si riche qu’il est l’un des éléments essentiels à la biodiversité, gage de bonne santé pour la forêt toute entière. Il régule par exemple les parasites. Ensuite il joue un rôle de régulateur thermique, protégeant les troncs des arbres des trop grandes et néfastes variations de température.
Il tapisse la plupart de nos sous bois, ses graines y germent avec une grande facilité. Sa multiplication s’y fait également par bouturage successif des tiges. Ainsi, une seule graine va produire un pied de lierre capable de couvrir à lui seul des kilomètres carrés de sol. Aujourd’hui on connaît l’importance des arbres morts pour l équilibre écologique ; en prolongeant aussi l’existence des vieux bois, le lierre contribue à nouveau à enrichir le milieu.
Tant que l’arbre support est en bonne santé, tout se passe bien. Mais si celui-ci vient à avoir une faiblesse quelconque, grand âge ou maladie, les choses tournent mal. Le feuillage de l’arbre perd de sa densité et devient plus perméable à la lumière… le lierre en profite et reçoit plus de photons lumineux, sa photosynthèse améliorée permet donc sa croissance s’accélérer.
Par la même occasion il permet de prévenir l’observateur attentif de la mauvaise santé de l’arbre, lui signifiant qu’une intervention pourrait être utile.
Le lierre met l’édifice sur lequel il grimpe à l’abri des intempéries. Grâce à lui, la ruine est protégée des pluies dévastatrices qui contiennent de plus en plus de polluants chimiques. Les pierres gorgées d’eau sont plus sensible au gel qui les fait éclater et disloque ses joints. Il va aussi assainir le sol en évitant l’excès d’humidité, mauvais pour les fondations. Ne le laissez par contre jamais atteindre le toit car il va le dégrader en sinuant sous vos tuiles !
Seul un excès d’humidité au niveau des racines gênera sa culture, un arrosage régulier et un ombrage adapté pendant sa première année de plantation suffisent à réussir sa mise en place. Si vous prenez la peine de lui préparer un trou de plantation rempli de terreau, il va rapidement s’installer.
Les vertus du lierre
Concernant son utilisation en médecine, dans la tradition populaire, il sera aussi bien « le guérit tout » comme un grand nombre d’autres végétaux, qu’une plante associée à la magie et à la sorcellerie. Dioscoride au 1er siècle en vantait les vertus, mais en connaissait aussi les limites et les dangers lorsqu’utilisé sans modération.
Sa propriété la plus anciennement connue autrefois était de soigner les migraines. Tressée en couronne, la liane préservait soit-disant des contrecoups dus aux excès d’alcool. Pline l’Ancien préconise contre ces mêmes maux de tête l’association de rose et de feuilles de lierre en macération dans du vinaigre. Pour renforcer les effets bénéfiques de la plante, les Romains buvaient le vin dans des gobelets creusés dans le bois de lierre.
Quand à Apuleius en l’an 163 après J.C., il utilise le lierre à des fins bien particulières. Il affirme que onze baies mûres bues avec de l’eau pulvérisent les calculs rénaux. Ce remède fut récupéré plus de 17 siècles plus tard par un praticien anglais, le révérend O.Cockayne qui écrit en 1864 :
« Lorsque des calculs bloquent les reins, prendre 7 à 11 baies macérées dans de l’eau, les boire, et comme par miracle les calculs sont éliminés par les urines. »
Aujourd’hui on vous déconseille fortement de le faire, car on sait que les baies sont toxiques !
Pour les gaulois, le lierre est aussi une plante bénie des dieux. Consacré à Cernunnos, dieu de la forêt, il entre tout autant dans la fabrication de potions magiques que dans des préparations médicales préparées par les druides, pour la cellulite et les quintes de toux.
Dans les campagnes, on se servait du lierre comme d’un purgatif puissant. Pour cela il fallait consommer les fruits en petite quantité (8 à 10 baies).
Aucun auteur ne rapporte d’incident dramatique, mais on vous le déconseille tout de même.
La macération de feuilles était utilisée pour soigner les cors aux pieds. En infusant une feuille de lierre dans du vinaigre pendant 9 jours puis en frottant les cors pendant 9 autres jours.
Au début du 20ème siècle la médecine populaire ayant été laissée de côté, il a fallu toute la conviction de Cazin puis de Leclerc pour redonner leurs lettres de noblesse aux remèdes indigènes à base de plantes.
Enfin le suc, ou gomme récoltée sur les troncs des vieux lierres dans les régions méridionales a la réputation d’être un excitant efficace. Il servait aussi à réduire les engorgements des ganglions, améliorer les cas de surdité et les maux de tête.
Les effets vasodilatateurs de l’hédérine, une substance contenue dans les feuilles de lierre, prise à faible dose ont été mis en évidence par Hegi et Schulz.
Surdosée elle peut produire un ralentissement significatif des rythmes cardiaques.
L’infusion de feuilles fraîches ou sèches soulage les affections chroniques des voies respiratoires. Les saponines fluidifient les sécrétions et favorisent leur élimination, l’expectoration et leurs effets antispasmodiques permettent d’apaiser certaines crises d’asthme et de soulager les toux associées à la coqueluche. La posologie est une cuillerée à café (0,8 g) par tasse d’infusion, deux fois par jour.
Les effets sédatifs de la décoction ou de l’alcoolature sont utilisés en application externe pour soulager diverses douleurs: névralgies, rhumatismes, ulcères, coup de soleil et cellulite.
En 1988, la Commission E allemande a reconnu l’usage des feuilles de lierre grimpant pour traiter les infections et les inflammations des voies respiratoires et les symptômes de la bronchite chronique d’origine inflammatoire.
Bien que l’efficacité du lierre ne soit pas démontrée pour traiter l’insuffisance veineuse, son action sur les enzymes associés à cette affection (hyaluronidase et élastase) pourrait lui conférer un effet synergique lorsqu’on l’associe à d’autres plantes riches en saponines, comme le marronnier d’Inde (Aesculus hippocastanum) et le fragon épineux (Ruscus aculeatus), qui ont démontré une certaine efficacité pour combattre l’insuffisance veineuse
Les feuilles du lierre peuvent provoquer des dermites de contact (falcarinol) chez certaine personne mais c’est relativement rare. Appliquer dans le creux du coude et attendez 48h pour voir s’il y a une réaction inflammatoire.
Pour Palaiseul il est un calmant et un modérateur très efficace de la sensibilité des nerfs périphériques. Quand à son efficacité supposée pour lutter contre la cellulite, elle serait due en partie à l’hédérine. Décoctions et emplâtres a base de lierre sont très efficace pour ce problème et sont utilisés dans de nombreuses préparations pharmaceutiques. On en fait des cataplasmes avec une part de feuilles de lierre fraîches juste hachées menu, pour trois part de farine de lin.
Autres utilisations :
Son bois est parfait pour faire du feu avec la technique de frottement, on l’utilise comme planchette sur laquelle on frottera avec une drille par exemple de laurier noble.
On l’utilise également pour nettoyer les vêtements du fait de ses saponines.
Voici comment faire sa lessive au lierre:
- Laisser reposer 150 feuilles en décoction pendant 20 min dans 2 litres d’eau
- broyer la mixture puis laisser macérer quelques heures avant de la filtrer.
- On ajoutera le liquide à l’eau de lavage.
Comment faire sa teinture alcoolique ?
Mixer 100 g de feuilles lobées séchées avec 500 ml d’alcool à 70 degré et laisser macérer 2 semaines en remuant tous les jours. Filtrer puis mettre en flacon.
Il est conseiller d’utiliser seulement 1,5 ml par jour dilués dans l’eau. 1,5 ml représente environ 1/3 de cuillère à café.
Contre indication : Grossesse.
Les feuilles du lierre renferment une petite quantité d’émétine, une substance qui pourrait, théoriquement, occasionner des contractions utérines.
Pour aller plus loin, découvrez le livre de Bernard Bertrand « Au royaume secret du lierre » Éditions de Terran.
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Pour aller plus loin
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