Ici au Chemin de la Nature, on adore les plantes, on protège la biodiversité… mais il faut savoir que parfois… trop de diversité tue la diversité ! Explications en article.
Qu’est ce qu’une espèce exotique envahissante ?
Si vous l’ignoriez, les botanistes estiment à 400 000 le nombre total d’espèces de plantes existant sur Terre. Chacune de ces plantes est apparue à un endroit bien précis, dans un contexte bien précis, et en association avec des partenaires bien précis. On parle d’espèce indigène pour désigner une espèce de plante qui évolue dans son milieu d’origine. Lorsque l’aire de répartition d’une plante est très petite et limitée à une petite zone géographique, on peut parler d’espèce endémique.
Avec notre entrée dans l’anthropocène (un terme qui a été proposé pour désigner l’ère depuis laquelle l’humain a un impact global sur les écosystèmes), les plantes ont été cultivées, importées, échangées… Ces grands mouvements d’espèces à travers la planète ont permis à certaines plantes de s’implanter en dehors de leur aire de répartition normale. On parle alors de plantes exotiques, par opposition aux plantes indigènes. Dans les livres, vous pouvez également trouver les termes “espèce exogène” ou “allochtone”.
Devenir envahissant en quelques astuces :
Le “succès” des plantes exotiques envahissantes en dehors de leurs aires de répartition tient à plusieurs éléments.
- Une croissance rapide, ou un pouvoir de couverture du sol très élevé.
On peut par exemple citer l’ailante (Ailanthus altissima), l’une des confusions du frêne commun (Fraxinus excelsior), qui croît rapidement jusqu’à 20m de hauteur et dont les centaines de milliers de graines munies d’un aileron peuvent voyager sur de grandes distances ! - Une capacité à diminuer la croissance des espèces voisines, en émettant par exemple des substances chimiques via leurs racines (on parle d’allélopathie)
- Une grande capacité de reproduction : certaines espèces produisent des milliers de graines et peuvent facilement se bouturer toutes seules ! Les graines de plantes comme l’ambroisie peuvent rester viables dans le sol pendant plus de 10 ans ! Au moindre bêchage, c’est reparti pour une génération !
- Une forte capacité de réparation après une agression : certaines espèces comme la renouée du Japon peuvent redémarrer à partir d’un fragment de moins de 10cm de racine ! Il est donc nécessaire d’avoir recours à des techniques de broyage très poussées pour s’en débarrasser dans les sols.
- L’absence de prédateurs, de pathogènes, d’herbivores pour contrôler les populations sur les nouveaux territoires occupés.
- Les changements de condition de croissance (exemple : réchauffement, assèchement d’un sol…) qui permet à une espèce exotique bien adaptée à ces conditions de prendre le dessus sur des espèces indigènes affaiblies.
Quid des plantes “invasives” ?
On a souvent tendance à utiliser le terme “invasif” pour désigner ces espèces étrangères et envahissantes. Cependant, il ne faut pas oublier qu’une espèce indigène peut se révéler “envahissante” à sa façon. Ainsi des espèces comme la ronce, l’ortie ou autres plantes qui se propagent rapidement grâce à des rhizomes couvrent rapidement de grandes surfaces. Comme elles évoluent dans un écosystème compétitif qui leur permet de se réguler, cela n’a pas forcément d’impact sur la biodiversité locale. Ce qui n’est pas forcément le cas pour des plantes exotiques qui n’auraient pas de prédateurs ou de parasites. Les conservatoires botaniques s’accordent donc sur la dénomination “espèce exotique envahissante”, qui traduit à la fois l’implantation d’une espèce étrangère, et sa capacité à proliférer au détriment d’autres espèces.
C’est grave docteur ?
Est-ce qu’il est si grave de voir proliférer ces espèces exotiques envahissantes ? Bien heureusement, toutes les espèces qui viennent d’ailleurs n’ont pas le même impact sur notre environnement ! Mais certaines espèces menacent directement l’aire de croissance d’espèces indigènes, au point que certains taxons de plantes sont susceptibles de disparaître. Lorsque l’on observe cette menace, des procédures sont lancées pour tenter de contrôler les populations de plantes envahissantes.
C’est d’autant plus important que certaines plantes menacent parfois directement la santé humaine ou nos activités. On peut prendre l’exemple très connu de l’ambroisie à feuille d’armoise (Ambrosia artemisiifolia), qui génère chaque année des milliers de cas d’allergies violentes, ou encore le cas de la berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum) dont la sève est photosensibilisante et provoque des brûlures au soleil.
Vous pouvez trouver un guide de gestion de l’ambroisie mis à disposition par le Ministère des solidarités et de la santé, ici.
Un concept qui ne s’applique pas qu’aux plantes !
Comme pour les plantes, de nombreux animaux, insectes ou micro-organismes peuvent sortir de leur aire de répartition naturelle.
La liste des espèces introduites envahissantes est disponible sur le site de l’Inventaire National du Patrimoine Naturel. Chaque personne peut contribuer à signaler la présence d’une espèce exotique envahissante sur le site du Muséum d’Histoire Naturelle.
Régulièrement, de nouvelles actualités médiatiques couvrent la problématique de telle ou telle espèce : tantôt le Varroa destructor, un acarien parasite des abeilles venu d’Asie, ou encore la présence de vers plats argentins, dont l’impact écologique est encore incertain mais qui se nourrit de la faune du sol local. Toutes ces espèces envahissantes sont surveillées à l’échelle nationale pour éviter qu’elles ne nuisent de façon trop dramatique à la biodiversité locale.
Une gestion qu’on ne doit pas laisser au hasard !
La plupart des espèces exotiques envahissantes font l’objet d’une réglementation stricte sur la façon de les gérer, et d’en gérer les déchets. Si votre jardin ou votre commune contient l’une des plantes mentionnées sur les listes de référence, vous pouvez vous rapprocher du Conservatoire Botanique ou de l’Office Forestier le plus proche afin de demander conseil sur la manière de gérer ces espèces et ainsi limiter leur protection.
En tout cas, pour les espèces envahissantes qui ne sont pas toxiques et compte tenu du fait que leur présence seule suffit à poser un problème à la biodiversité… on se sentira moins coupables d’en prélever un peu en cueillette. N’ayez donc pas trop de remords lorsque vient la saison des fleurs de robinier faux-acacia (Robinia pseudoacacia), des jeunes tiges de renouée du Japon ou encore de la vergerette du Canada ! Certains restaurateurs n’hésitent pas à se tourner vers la cuisine, utilisant des espèces exotiques envahissantes pour élaborer leurs plats.
Pour étayer votre réflexion sur la pertinence et les dangers que représentent la cueillette, rendez-vous dans cet article.
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